Dossier & Communiqué
Publié le 25 juin 2025

Décret à venir sur les pouponnières : la promesse d’encadrement doit répondre aux besoins fondamentaux des 0-3 ans et fluidifier leur parcours

Interrogée le 19 février dernier par la Commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance1, la Ministre Catherine Vautrin a exprimé une priorité politique forte : faire évoluer l’accompagnement des tout-petits enfants protégés (0-3 ans). En particulier, elle s’est engagée à réviser d’ici l’été 2025 l’arrêté de 1974 encadrant les pouponnières, pour éviter leur saturation chronique

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Interrogée le 19 février dernier par la Commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance(1), la Ministre Catherine Vautrin a exprimé une priorité politique forte : faire évoluer l’accompagnement des tout-petits enfants protégés (0-3 ans). En particulier, elle s’est engagée à réviser d’ici l’été 2025 l’arrêté de 1974 encadrant les pouponnières, pour éviter leur saturation chronique.

Cependant, les derniers échanges avec l’administration font douter du niveau d’ambition de la réforme. Pour ne pas être qu’une intention, cette révision doit s’accompagner de moyens à la hauteur des enjeux et des besoins.

Une ambition qui va dans le bon sens qui doit s’accompagner de moyens
La volonté annoncée par Madame la Ministre de faire des pouponnières « un lieu de placement temporaire et transitoire », notamment en instaurant « une durée maximale de placement » est souhaitable. Pour être effectif néanmoins, cet objectif nécessite de renforcer les possibilités en termes d’orientation des enfants, notamment chez les assistantes familiales mais dont la démographie reste très défavorable. Le travail avec les parents et le retour au domicile nécessite également des moyens dédiés qu’il convient de valoriser et chiffrer.

Le taux d’encadrement dans l’arrêté de 1974 : un taux obsolète ne pouvant plus servir de référence

En l’espace de 50 ans, les Conseils départementaux ont développé les moyens des pouponnières afin de les adapter aux missions qui se sont enrichies au fil du temps, rendant le texte de référence de 1974 très largement caduc.
Aussi, pour actualiser le taux d’encadrement, ce texte, qui permet tout juste la réponse aux fonctions vitales (nourrissage, nursing) ne doit pas être un point de référence. Si le futur décret ne fait qu’améliorer à la marge l’arrêté de 1974, il risque paradoxalement de proposer des taux d’encadrement moins-disants par rapport à la réalité de moyens de nombreuses pouponnières !

C’est pourquoi nous plaidons en faveur d’un taux d’encadrement profondément rénové, qui traduise la réalité des missions et des fonctions à mettre en oeuvre pour qu’une pouponnière ait les moyens de répondre aux besoins fondamentaux et spécifiques des enfants confiés dans leur globalité. L’enfant doit bénéficier d’une prise en charge holistique.

Ces besoins sont multiples et ne se limitent pas au nourrissage et nursing qui sont une vision réduite des missions des pouponnières : prise des biberons et repas ; holding(2) ; maternage ; bilans, suivis médicaux et accompagnement para-médical ; lien et rencontres avec les parents ; socialisation/exploration ; accompagnement du sommeil ; toilette et change ; stimulation et apprentissage etc.
Le deuxième élément indispensable à prendre en compte est celui des temps des professionnels en dehors des temps de face à face avec l’enfant : temps de lien et de travail avec les parents ; visites médiatisées ; coordination; lien avec les partenaires (ASE ; justice ; police ; éducation nationale ; santé ; médico-social) ; supervision et formation ; transmission ; reporting ; réalisation des écrits professionnels, développement des liens avec les partenaires ; les professionnels de santé ; présence aux audiences judiciaires.


C’est la raison nous soutenons un taux d’encadrement pour les auxiliaires de puériculture d’1 professionnel pour 5 enfants le jour. Pour mémoire, le rapport Santiago préconise un taux d’encadrement d’1 professionnels pour 3 enfants le jour.


L’importance de limiter la taille des unités
La prise en considération de la taille du groupe est également déterminante pour apporter la notion de permanence des liens, leur continuité, permettre l’identification de repères : ces éléments composent le socle de la prise en charge qui concourent à l’ancrage de la sécurisation du tout-petit.
Aussi, l’exigence en termes de taux d’encadrement ne peut être mise en oeuvre qu'à partir d'une taille de groupe restreinte, que nous fixons à cinq enfants par unité de vie.


Il n’y a plus de temps à perdre pour les tout-petits, il est nécessaire d’avoir un décret qui encadre et qui protège, véritablement.

(1) Compte rendu de réunion n° 26 - Commission d'enquête sur les manquements des politiques publiques de protection de l'enfance - Session 2024 – 2025 - 17e législature - Assemblée nationale

(2) Le holding, notion développée par Winnicott, désigne l'ensemble des soins donnés à l'enfant par la mère et sa capacité à contenir ses angoisses à la fois sur le plan physique (le fait de porter dans les bras, de bercer etc.) et psychique (la capacité de la mère à penser les émotions de son enfant).